Après avoir rencontré Jim Walmsley – A LIRE ICI, c’est presque par hasard que la rencontre avec Caroline Chaverot s’est organisée au cœur du massif des Ecrins.
C’est par le biais des réseaux sociaux (Instagram), que je découvre que Caroline est en vacances itinérantes dans les Hautes Alpes.
Quelques échanges de messages et nous voilà à nous retrouver au Col du Lautaret avec comme dernières infos « on est garé au milieu des autres camping-cars au fond du parking ».
Rencontre sur les sentiers avec la N°1 mondiale, Championne du Monde de Trail 2016, vainqueur de l’UTMB®, de La Transgrancanaria, lauréate de l’UTWT® et qui a connu un début de saison compliqué en raison de problèmes de santé – A LIRE ICI.
Victorieuse en 2017 de la Maxi Race, du Lavaredo et de la Hardrock 100.
« Tu vois un sommet, t’y vas » : Caroline Chaverot
Le temps est splendide, on profite des premiers rayons de soleil qui réchauffent l’atmosphère à 2 000 m d’altitude pour prendre un petit café avant de partir courir vers le Lac d’Arsine.
Luc, son mari et ses 3 enfants, Eva (9 ans), Tom (7 ans) et Noé (6 ans) et le chien ont déjà pris de l’avance sur nous.
Nous partons sur un bon rythme, en général avec Caroline ça va vite en course et à l’entraînement, le chemin est large et peu technique à cet endroit, et par chance il suit la courbe de niveau avec en toile de fond la Meije et le Pic Gaspard.
Caroline profite de ces paysages qu’elle découvre en version estivale, « j’aime cette sensation de liberté, courir dans de tel environnement est un privilège et lorsque je vois ces sommets j’ai juste envie d’y aller »….une aspiration qu’elle partage avec son mari.
Naturellement on en vient à évoquer ses sensations après la Hardrock en juillet où elle a terminé très fatiguée et avec quelques blessures.
« J’ai fait une coupure complète d’une semaine après mon retour des Etats-Unis, j’ai soigné mes plaies aux mains et genoux, mais surtout j’avais une côte de fêlée. J’ai voulu reprendre début août par le stage Salomon autour du Mont-Blanc mais au second jour je suis rentrée chez moi, je n’étais pas en forme.
J’ai alors observé quelques jours de repos supplémentaires et j’ai vu mon ostéopathe qui m’a bien remis sur pied. La douleur thoracique ne venait pas que de la côte mais était due à des tensions musculaires et nerveuses ».
« Oui, je veux essayer de gagner cette année…» : C. Chaverot
Puis vient le temps des vacances en famille (et en camping-car) début août « on avait prévu de partir dans les Dolomites, mais le temps était mauvais alors on est resté là ou il faisait beau », un mode de vacances qu’ils ont adopté depuis quelques années.
Les Hautes Alpes, Névache, La Clarée, un terrain de jeu idéal, sauvage et magnifique « j’ai fait le Mont Thabor (3 178 m), 2 jours après avoir repris sérieusement l’entraînement, je me sens en forme » tout en précisant aussi peut-être pour se rassurer aussi « oui, aujourd’hui ça va bien »
Caroline me devance sur ce single en balcon en direction du col d’Arsine, elle est partie très light (à l’inverse de Jim Walmsley), juste une flasque Salomon à la main, un coupe vent et son téléphone, « j’aime m’entraîner avec très peu d’équipement, je trouve de l’eau en cours de route si besoin, ça ne me gène pas d’être ensuite plus chargé en course ».
Le sentier s’élève légèrement avec quelques relances, elle adopte une attitude qui lui est particulière alternant 3-4 pas de marche rapide suivis de 3-4 foulées.
On en vient à évoquer la suite de sa préparation et ses ambitions sur cette édition 2017, « je vais faire un peu plus de qualité la semaine avant la course, j’ai pas pu en faire beaucoup cette année, le foncier je l’ai après avoir terminé la Hardrock », c’est d’ailleurs aussi ce qui la met en confiance tout comme sa victoire en terre Chamoniarde en 2016.
« Oui, je reviens pour essayer de gagner même si c’est un peu prétentieux de le dire, malgré une année compliquée je ne pense pas avoir trop perdu. J’ai éliminé certains points qui me souciaient l’an passé, comme l’alimentation et la boisson ou je suis plus au point maintenant ».
Au niveau des ravitaillements, elle retient aussi sur son expérience 2016, « Je vais faire en sorte aussi de m’arrêter un peu moins longtemps aux ravitaillements », elle qui est déjà connue pour des ravitaillement plutôt rapides, cela devrait être express cette année !!!
Enfin va aussi utiliser ses bâtons (des monobrins) plus tôt en course « je pense que cela m’aidera dans les descentes à m’économiser musculairement, je vois des coureurs comme Luis Alberto ou Ludo Pommeret le faire », elle a retenu cela de la descente sur Courmayeur de 2016 qui avait été douloureuse.
Mais tu n’utilises pas les bâtons à l’entraînement ? « Non, cela me permet de travailler la force dans les cuisses ».
Avant d’ajouter « le jour de la course, je ferai sur le moment en fonction aussi de mes sensations ».
« Avec une AUT, je ne courrais pas en compétition »
On arrive alors au Col d’Arsine (2 340m), Caroline fait même une photo du glacier et du paysage en ajoutant avec un large sourire, « d’habitude je ne prends jamais le temps de faire une photo ». On continue notre chemin vers le Lac d’Arsine (2 465 m), un chemin technique qui monte sur la moraine comme elle les aime.
Il ne fait pas chaud, le lac est gris, couleur du calcaire due à l’érosion, un rapide tour et on entame la descente vers le refuge de Villard d’Arène au milieu des alpages où l’on sillonne entre les vaches, sous le regard des marmottes.
On a déjà 20 kilomètres au GPS, mais pas de répit.
On en vient alors à parler de sa santé, elle souffre depuis la fin de la saison 2016 d’une hyperthyroïdie et doit prendre un médicament pour réguler la thyroïde.
Forcément cela ne doit pas laisser planer de doutes, et Caroline est très claire « j’ai trouvé le bon dosage, en Mai dernier on avait augmenté les doses et je n’étais pas bien. Aujourd’hui je ne ressens plus les effets du médicaments, mon corps s’est adapté et je vais même diminuer les doses certainement pour éviter une hypothyroïdie ».
« Ce médicament n’est bien sûr pas dopant et ne nécessite pas non plus d’AUT (Autorisation à Usage thérapeutique), d’ailleurs si c’était le cas, je ne courrais pas en compétition, ce serait contraire à mon éthique ».
« Dans l’Ultra, j’aime ce côté aventure… »
Quelques mètres plus loin, elle aperçoit au loin sa petite famille assise sur un rocher au bord du torrent, c’est vrai que c’est l’heure du pique-nique après 2 heures de marche.
Seul le chien semble fatigué de sa matinée, « Ah maman, ça va ? on a vu plein de marmottes et tes crêpes sont trop bonnes ».
Dix minutes de pause, un morceau de crêpe, une gorgée d’eau et on repart, « je termine la sortie et je reviens à votre rencontre après » précise t-elle en partant.
« Je voulais pas faire plus de 25 km et environ 3 h », on approche du Col du Lautaret, les randonneurs s’écartent gentiment pour nous laisser passer, impressionnés par la foulée de la Championne Française.
Caroline aime courir en montagne et être en communion avec la nature elle qui était membre de l’équipe Suisse de Kayak « j’ai arrêté le Kayak du jour au lendemain, maintenant ce que j’aime dans l’Ultra c’est le côté aventure et courir seule ».
D’ailleurs même en course vous la verrez souvent seule « j’aime courir à mon rythme, en course, si l’on me rattrape ou si je rattrape quelqu’un je m’arrange pour me retrouver seule le plus rapidement possible ».
« Si demain j’arrête la compétition, le trail restera un mode de vie, je ferai aussi plus de montagne, de l’alpinisme et de l’escalade ».
Le compte est bon, 25 km et 2h50 en montagne, un verre d’eau fraîche, elle prépare son sac pour repartir en mode randonnée.
« La musique m’apporte des pensées positives »
Dans quelques jours elle sera au départ de l’UTMB® avec le statut de grande favorite, les écouteurs dans les oreilles, une playlist très éclectique, la musique en course on aime ou on n’aime pas. « J’ai 2 Ipod pour la course, comme ça je ne m’entends pas respirer (NDLR : elle respire très fort à l’effort), mais surtout ça m’évite de trop gamberger dans les moments plus durs, ça m’apporte des pensées positives ».
Et lorsque l’on parle de la ligne d’arrivée à Chamonix, forcément son regard pétille, elle rêve de revivre cette émotion qu’elle a connue en 2016 et de partager avec le public, mais pour cela il faudra boucler les 170 km.
« A l’arrivée, je ne rêve pas de grand chose, une grande bouteille d’eau gazeuse, des fruits frais et surtout de retrouver ma famille et mes amis ».
Dès le lundi, elle retrouvera les bancs du lycée de Genève où elle enseigne l’Histoire – Géographie avec une nouveauté puisque elle sera cette année à 60% afin de consacrer plus de temps à son sport et à sa famille.
Par Fred Bousseau – ©Fred Bousseau – août 2017.
Retour sur son succès 2016 à l’UTMB® – A LIRE ICI.
*Caroline Chaverot a réalisé une saison 2016 exceptionnelle :
Lauréate de la Transgrancanaria, du Trail du Ventoux, du Trail de la Galinette, du Trail des Glaisins, du Madeira Ultra-Trail, du 80 km du Mont-Blanc, des Mondiaux de Skyrunning, de l’UTMB®, des Championnats du Monde de Trail, le MSIG Lantau HK 50 et du classement final de l’Ultra Trail World Tour.
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